Un souffle nouveau pour l’Europe

Conscients de l’enjeu que représentent, pour l’avenir dans l’Union européenne, les élections européennes du 9 juin prochain, les évêques de différents diocèses frontaliers d’Europe de l’ouest ont décidé de s’adresser à leurs fidèles, comme ils l’avaient fait en 2019 à la même occasion. Titrée Un souffle nouveau pour l’Europe, la lettre pastorale a été présentée à la presse le 8 avril, à Scy-Chazelles, là où vécut et où est enterré le vénérable Robert Schuman, père de l’Europe.

Celui qui n’ose pas s’attaquer à ce qui est mauvais sait mal défendre ce qui est beau. Cités par Patrick Weiten, président du conseil départemental de la Moselle, dans son allocution de bienvenue, ces mots du vénérable Robert Schuman, sonnent terriblement d’actualité. En réponse aux enjeux de la « crise de conscience européenne », la lettre pastorale est l’œuvre commune d’un groupe d’évêques de différents pays, rédigée au nom d’une conviction partagée que la frontière ne doit pas être un obstacle pour des voisins, explique Mgr Marc Stenger, évêque émérite de Troyes. Elle veut affirmer les valeurs prioritaires en Europe à l’occasion des prochaines élections européennes.

Partant de l’histoire européenne, de ses points forts et de ses crises, Mgr Jean-Pierre Delville, évêque de Liège, précise ces valeurs communes qui unissent les Européens : sens du respect de la personne humaine, rencontre des cultures, goût de la paix, justice et solidarité. Il cite encore Robert Schuman qui disait, en 1951 : Notre objectif doit être d’établir une communauté spirituelle entre les hommes et entre les nations. Ceux qui ont le bonheur de pouvoir y contribuer, par leur esprit de fraternité fondé sur une conception chrétienne de la liberté et de la dignité humaine, seront parmi les meilleurs artisans d’une Europe rénovée et unie.* Les évêques de l’Euregio s’attachent à approfondir leurs échanges, s’enrichissant mutuellement. Nous retenons de Robert Schuman l’écoute de l’autre, toujours essayer de le comprendre, insiste Mgr Philippe Ballot, archevêque-évêque de Metz. Les évêques de l’Euregio ont la responsabilité de territoires qui furent des terrains de guerres et d’affrontements et qui sont aujourd’hui des territoires de fraternité.

Forts de nos atouts européens, quel nouveau souffle voulons-nous donner à notre continent ? Il est celui de l’évangile du dimanche de la miséricorde, rappelle Mgr Delville, dans lequel Jésus dit à ses disciples : « ‘La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie’. Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : ‘Recevez l’Esprit Saint’ » (Jn 20, 21-22) ». L’Esprit du Christ souffle sur nous aujourd’hui pour que nous soyons ses messagers de paix, à la suite de Robert Schuman.

À l’issue de la signature, les évêques ont été se recueillir auprès de la sépulture de Robert Schuman, dans l’église Saint-Quentin et prier « pour la justice, pour la paix, pour la solidarité, pour que nous ayons la force de nous engager dans une écologie intégrale, pour tous les habitants de notre Europe, pour les jeunes qui doivent bâtir le monde de demain, pour que l’Europe garde ses valeurs avec une grande humilité ». Un chant s’est élevé spontanément sous la voute médiévale de l’église : Dans nos obscurités, allume le feu qui ne s’éteint jamais. Le feu qui nous permettra, à l’appel des évêques de l’Euregio, « au moment de déposer nos bulletins dans l’urne, d’être conscients que nous votons pour un projet d’espérance ».

* in La mission de l’Europe, dans Pax Romana, 1951, repris dans La politique pour vocation, éditions Salvator, 2022, p. 119.