Lumière

Lc 1,39-45

« Lumière qui éclaire tout homme en venant dans le monde » (Jn 1,9)

« En entrant dans le monde, le Christ dit : Me voici mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté. » En plaçant cette phrase de la lettre aux Hébreux entre l’annonce qu’un enfant naîtra à Bethléem (1re lecture) et la visite que fait Marie enceinte à sa cousine Élisabeth (évangile), la liturgie d’aujourd’hui nous rappelle à sa façon que Noël, à travers l’évocation d’une naissance, nous parle de bien plus que d’un petit bébé joufflu ! Michée le dit clairement : l’enfant qui naîtra a destin de royauté, il deviendra un berger, un guide.

Concluons notre réflexion au fil de l’Avent en citant l’Évangile que l’on proclame à la messe du jour même de Noël : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. (…) Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. (…) Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. » (Jn 1.9.11-12) Noël, c’est aussi cela. En fait, n’est-ce pas SURTOUT cela ? Jésus, c’est Dieu lui-même venu dans le monde pour SE révéler aux hommes. C’est pour cela que l’évangéliste l’appelle le « Verbe ». En Jésus, Dieu se laisse connaître dans sa nature profonde : un Dieu qui nous aime tellement qu’il nous laisse libres, qui refuse de s’imposer à nous et préfère nous proposer le chemin qui mène à la vie, à la lumière. Ce chemin, c’est celui de l’amour, de l’amour prêt à aller jusqu’au bout du don de soi.

« Venir dans le monde », c’est aussi pour Dieu assumer pleinement la valeur de ce monde qu’il a créé. « Dieu vit que cela était bon », dit le récit de la création. Il est aujourd’hui bien difficile de comprendre comment l’Eglise pouvait se sentir fidèle au Dieu qui s’est incarné quand elle réprouvait si fortement tout ce qui avait trait au corps, aux passions, etc. N’est-il pas bon de se redire que la pensée biblique appelle au contraire au respect de ce que Dieu a créé avec amour, qu’il s’agisse du corps humain, ou qu’il s’agisse de la terre dans son ensemble, notre « maison commune » (pape François), qui est « la seule que nous ayons » (l’astrophysicien Hubert Reeves) car « il n’y a pas de plan B » (Ban Ki-moon, sec.-gén. Onu).

Il n’est pas surprenant que celui qui a inventé le concept de « crèche de Noël », François d’Assise, soit aussi celui qui a composé le magnifique « Cantique du frère soleil », où toutes les créatures sont louées et reconnues comme nos frères et nos sœurs. Pour lui, la Nativité était la plus grande fête, précisément parce qu’elle manifeste l’amour incommensurable de Dieu pour son oeuvre et, de façon suréminente, pour l’être humain, qu’il a créé « capax Dei », capable de l’accueillir. Le Pape actuel, qui a courageusement décidé de s’identifier au petit pauvre d’Assise dans sa mission de « réparer l’Église », convie sans cesse les fidèles à la cohérence : d’un côté, la foi au Christ qui suscite en nos cœurs cette « paix de Noël » et, d’un autre côté, un engagement ferme envers la création et envers nos frères et sœurs dont la dignité est bafouée. C’est tout cela qu’il faut chercher à tenir ensemble quand on croit que l’humanité a été conçue de toute éternité par son Créateur, lui qui savait qu’il allait devenir un jour « la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde ». Joyeux Noël !